Akdital : Retrait tactique et stratégique, surtout pas un renoncement

Dr Anwar CHERKAOUI
Expert en communication médicale et journalisme de santé

Le retrait du dossier relatif aux centres médicaux de proximité, annoncé dans la lettre datée du 20 novembre 2025, a été interprété par certains professionnels de la santé comme une marche arrière inattendue du groupe Akdital.

Pourtant, une lecture attentive du document révèle une réalité différente : il ne s’agit pas d’une renonciation, encore moins d’un abandon du projet d’expansion, mais bien d’un recul tactique destiné à désamorcer une tension professionnelle et à repositionner l’offensive sur un autre terrain.

Dès les premières lignes, le président du groupe Akdital justifie la décision par les inquiétudes exprimées par des confrères et par la volonté affichée d’apaisement.

Le message est diplomatique, presque conciliant, mais jamais le texte ne parle d’abandonner l’idée de centres de proximité.

Il évoque uniquement le retrait du dossier auprès du Conseil de la Concurrence, et non l’abrogation du projet lui-même.

Le désengagement est administratif, pas stratégique.

L’élément le plus révélateur se trouve dans la seconde page de la lettre lorsque le président annonce la “réorientation des investissements vers d’autres centres d’intérêts, notamment à l’international”.

En langage managérial, réorienter ne signifie jamais renoncer.

Cela traduit plutôt une volonté de détourner le flux de critiques, de protéger l’image du groupe et de poursuivre sa croissance ailleurs, dans un espace moins conflictuel.

Akdital évite ainsi une confrontation directe avec la profession dans le Royaume du Maroc tout en maintenant intacte sa capacité d’action.

Le texte s’attarde longuement sur la confiance, les relations avec les médecins du secteur libéral, hors Akdital, et la prospérité commune.

Ce registre lexical, inhabituel pour une simple communication technique, signale une tentative assumée d’apaiser un milieu médical crispé.

Quand une organisation répète qu’elle ne souhaite pas concurrencer la profession, c’est qu’elle sait que cette inquiétude existe réellement.

Cela révèle non une erreur stratégique, mais une nécessité politique de calmer le jeu.

La lettre insiste également sur une “incompréhension des objectifs” de la part de certains confrères.

Cette formulation, souvent utilisée en communication de crise, permet de se retirer honorablement tout en laissant la porte ouverte à un retour ultérieur.

Le groupe se montre attentif, écoute les critiques, mais ne renonce en rien à son ambition initiale.

Il se contente de revoir sa méthode et son timing.

Les remerciements très appuyés adressés aux médecins, saluant leur confiance et leur collaboration, confirment que le groupe cherche à restaurer un climat favorable avant de relancer, sous une autre forme, son projet d’expansion territoriale.

Ce geste de courtoisie professionnelle ressemble à un repositionnement, pas à une capitulation.

Enfin, en rappelant sa détermination à améliorer le service rendu au patient, Akdital réinstalle subtilement la justification morale qui lui permettra, demain, de revenir avec un projet remodelé.

L’intérêt du patient devient le ciment argumentaire qui prépare la relance d’un dossier encore sensible aujourd’hui.

Le retrait annoncé n’est donc pas une fin, mais une respiration.

Un repli destiné à conserver les alliances, apaiser les tensions et déplacer l’effort stratégique vers un terrain plus opportun.

Une pause dans la forme, mais pas dans le fond.

Akdital a simplement choisi un autre chemin, un autre rythme, et peut-être d’autres acteurs, pour poursuivre une vision d’expansion qui reste intacte.